Voici un article paru sur le site Thrive Global  le 6/11/17 et qui partage un discours d’Amma sur la science te la spiritualité

«L’une des plus grosses erreurs de l’humanité a été de séparer science et spiritualité, créant ainsi deux catégories de gens – les soi-disant « rationalistes » et les soi-disant « religieux ». Les scientifiques affirment que la religion et la spiritualité sont fondées sur une foi aveugle, tandis que la science s’occupe de faits démontrés par l’expérimentation. Ensuite est venue la question : « De quel côté êtes-vous ? Du côté de la foi ou des faits démontrés ?

Cette séparation a creusé un fossé inutile et malsain au sein de la société et généré un immense conflit, tant à l’échelle individuelle que mondiale. Cette erreur a même finalement conduit à l’épuisement de nos ressources naturelles et à la disparition de l’harmonie entre l’homme et la nature. Si nous voulons que le monde continue à fonctionner de manière durable et équilibrée, science et spiritualité doivent s’unir. L’époque actuelle et le monde qui nous entoure exigent cette transformation.

Cette séparation repose sur une erreur de compréhension. Il est inexact de dire que la spiritualité est fondée sur la foi aveugle. Tout comme les scientifiques contemporains effectuent leurs recherches au sein du monde extérieur, les grands sages ont conduit des recherches dans le laboratoire intérieur de leur mental. De ce point de vue, eux aussi étaient des scientifiques. En réalité, le fondement d’une véritable religion n’est pas la foi aveugle mais la recherche – une intense exploration de son propre Soi. Les Écritures relatent les expériences de ceux qui ont accompli cette intense recherche. Même un scientifique formule d’abord une hypothèse. Il essaie ensuite de la démontrer par le biais d’expérimentations. Ainsi, le scientifique passe d’une théorie à l’autre jusqu’à atteindre la vérité. Le chemin de la spiritualité est similaire.

La spiritualité indienne n’a jamais opposé science et spiritualité, les considérant plutôt comme les deux ailes d’un oiseau. La science s’occupe du monde objectif tandis que la spiritualité s’occupe du subjectif – l’essence ultime de notre existence. La science s’occupe du visible, la spiritualité de la vision – la pure Conscience qui est notre être intérieur. Il y a donc des domaines impénétrables pour la science. Si nous voulons des réponses concernant ces domaines, soyons prêts à étudier les textes spirituels et religieux. Le contraire est également vrai.

La science a réalisé d’énormes avancées en matière de technologie et de médecine et a contribué à l’amélioration de notre confort physique et de notre compréhension du monde matériel. Cela dit, si nous voulons découvrir la paix et la satisfaction intérieures, la compassion et l’amour universels, tournons nous vers la spiritualité. Sinon, nos vies et nos actions seront déséquilibrées et il nous manquera toujours quelque chose.

C’est l’histoire d’un superordinateur censé répondre à n’importe quelle question – sur les sciences, les mathématiques, l’histoire, la géographie, etc. Si des gens lui posaient des questions sur le soleil, la bonne réponse s’affichait sur l’écran en une fraction de seconde. Un jour, un malin petit garçon vint lui demander : « Bonjour superordinateur, comment vas-tu ? » L’écran clignota, s’alluma et s’éteignit avant de devenir totalement noir. Il n’y avait pas de réponse. L’ordinateur qui pouvait répondre à n’importe quelle question sur le monde extérieur ne pouvait répondre à aucune question sur lui-même. Ce même problème survient lorsqu’on n’accorde de l’importance qu’à la science. Tout comme nous avons besoin de nos deux jambes, la gauche et la droite, pour marcher, les connaissances spirituelles et matérielles sont nécessaires pour avancer dans la vie.

Même si au final la science étudie le monde extérieur et la spiritualité le monde intérieur, il est incorrect de dire que la spiritualité n’influe pas sur la vie matérielle. La spiritualité et l’existence ne sont pas séparées, elles sont une. La compréhension spirituelle devrait donc influencer non seulement notre façon de penser mais aussi notre façon de parler et d’agir. C’est pourquoi nos ancêtres ont accordé tant d’importance au partage, au soin, à la délicatesse et à la compassion. Ils ne tenaient pas seulement compte de leur existence physique mais croyaient aussi en une force première qui relie le sensible et le non-sensible comme des perles sur un même fil. De nos jours, nombreux sont ceux qui jugent « primitives » les idées ancestrales. Observons cependant la vie moderne : ses tensions, son immaturité émotionnelle et ses familles brisées, ses comportements impitoyables, son égoïsme, son avidité et sa façon d’exploiter la nature… Cette situation devrait suffire à nous montrer la nécessité d’un mode de pensée davantage basé sur la spiritualité. D’ailleurs, de nombreux scientifiques contemporains émettent des théories similaires.

Dépourvue de valeurs spirituelles, l’existence humaine est dénuée de sens. Ce sont ces valeurs qui élargissent la portée de la spiritualité à tous les domaines de la vie, tous les champs d’action, dont la science. À cet égard aussi, il est urgent de nos jours de mélanger science et spiritualité, technologie et compassion. Science et technologie doivent servir à l’épanouissement des pauvres et des démunis. Elles doivent progresser dans le respect de la planète et de toutes les créatures qui l’habitent.

À l’université Amrita, dans le cadre de leur cursus, nos étudiants sont encouragés – qu’ils étudient l’ingénierie, le commerce ou le travail social – à passer un mois ou deux en milieu rural dans des villages très pauvres, ou en ville dans des bidonvilles. Ils peuvent ainsi comprendre par eux-mêmes les problèmes auxquels ces populations démunies sont confrontées. Il nous reste ensuite à concevoir et déployer des solutions à ces problèmes et à écrire des publications à ce sujet. Cela contribue à soulager les opprimés, mais aussi à éveiller la compassion et l’attitude de service chez les étudiants. J’aimerais que des programmes similaires soient intégrés dans toutes les universités du monde.

Aujourd’hui, les universités sont essentiellement classées en fonction de leurs financements, du nombre d’articles publiés par leurs professeurs et de leurs compétences intellectuelles. Les promotions des professeurs dépendent de ces mêmes critères. Mais il faudrait aussi prendre en compte la façon dont les universités ont pu mettre leurs recherches au service des populations les plus pauvres et les plus vulnérables de la société.

Si on peut discuter de l’existence de Dieu, aucune personne raisonnable ne peut affirmer que l’humanité ne souffre pas : nous voyons la souffrance de nos propres yeux. Pour moi, rendre service à ces personnes vulnérables, c’est vénérer Dieu. Puisse l’humanité développer l’ouverture d’esprit nécessaire pour intégrer tant la connaissance scientifique que la compréhension spirituelle, et utiliser science et technologie pour aider les pauvres et ceux qui souffrent. Nous ne pouvons plus nous permettre de considérer que ces deux flux de connaissances coulent dans des directions opposées. En vérité, ils se complètent. Si nous les fusionnons, nous découvrirons que nous pouvons créer une puissante rivière – une rivière dont les eaux peuvent éliminer la souffrance et apporter la vie à l’ensemble de l’humanité.»

 

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