Extrait d’un article publié le 29.06.14 sur le blog d’Amritapuri

 »Des milliers d’heures de séva dans de nombreux secteurs sont nécessaires pour organiser le programme d’Amma au Nouveau Mexique. Cette année, comme d’habitude, je me suis occupée de faire la lessive des cuisines. Cela consiste à charrier des sacs de tabliers, de torchons et de vestes de cuisiniers humides, utilisés par les bénévoles qui préparent et servent les repas, pour les emmener au lavomatique du coin. Heureusement, aux États–Unis, il y a beaucoup de lavomatiques spacieux et pratiques. Cependant, tous ceux qui étaient proches avaient déjà été réquisitionnés par les personnes chargées de laver les 35 ballots de lessive du staff. Alors j’ai dû traverser tout Espanola en voiture – l’une des premières colonies hispaniques des États-Unis. De nos jours, la ville est connue pour : la lenteur de la circulation, les embouteillages de l’avenue principale qui traverse la ville, la vue splendide sur les montagnes (dont on peut profiter à loisir quand on est bloqué dans les encombrements) et quelques excellents restaurants qui servent une cuisine typique du Nouveau Mexique.

J’ai fini par me retrouver devant un long bâtiment sans étage à la peinture ocre écaillée qui arborait un panneau proclamant : « Lavomatique pour ceux qui économisent le moindre penny » … mais pas de penny qui vaille, j’avais emporté des rouleaux de pièces de 25 cents pour faire tourner les 5 machines pour triple charge et les 8 machines standard qui s’avéraient nécessaires. J’ai empilé des sacs et des sacs de linge sale sur un caddy, commencé à ajouter la lessive, et introduit mes pièces. Il était évident que j’étais étrangère dans cette ville, et tout le monde s’est montré très gentil et serviable envers moi et ma montagne de linge sale. J’ai parlé d’Amma, du programme gratuit du soir, donné les adresses et suscité ainsi l’intérêt de quelques personnes.

Les choses allaient bon train, mais au bout de quelques heures je me suis rendu compte que les cordons des tabliers n’avaient pas été attachés dans deux des machines de 20 kg. Je me retrouvais avec de véritables nœuds gordiens et les badauds poussaient des soupirs de sympathie tout en pariant sur le temps qu’il faudrait pour les défaire. On me suggéra de les remporter « chez moi » pour les démêler ; je me demandais bien où je pourrais m’installer dans cet hôtel très élégant qui nous accueillait pour la première fois et où nous nous efforcions de faire bonne impression, et qui plus est au milieu du millier de personnes qui convergeaient déjà vers la salle de bal Buffalo Thunder.

C’est alors qu’un employé du lavomatique a commencé à démêler le tas de cordons emmêlés. Une autre femme qui attendait que sa lessive soit terminée s’y est mise aussi. J’ai continué à transférer le linge mouillé dans les sèche-linge, à plier et à mettre en sacs le linge sec. Au bout d’une vingtaine de minutes, le duo était venu à bout des nœuds. Comme j’étais reconnaissante ! J’étais complètement épuisée, mais heureuse d’avoir un tas de tabliers tout propres pour le staff et les sévaïtes.

Je les ai remerciés encore et encore en leur répétant qu’ils ne savaient pas à quel point c’était important pour moi. On dit souvent que le Nouveau Mexique est un pot pourri de 3 cultures : hispanique – anglaise – indienne. Mais souvent, cela tient plutôt du ragoût où les groupes baignent dans le même pot sans pour autant interagir.

Par le passé, les espagnols, les indiens d’Amérique et les anglais se sont combattus âprement à Espanola. Mais un esprit de belle camaraderie régnait au lavomatique. Pourquoi écrire un article sur le lavomatique ? Je me suis souvenue que dans presque chacun de ses satsangs, Amma parle de l’importance d’un simple sourire et de petits gestes de gentillesse. Elle l’a encore redit dans son discours sur la Compassion à l’Université de Stanford, il y a 2 ou 3 jours.

Mes cordons de tablier illustraient parfaitement les propos d’Amma. Cet incident ne changerait pas la face du monde, mais pour moi, c’était énorme de voir des inconnus se porter volontaires pour un travail aussi rébarbatif que de démêler à grand peine des ficelles incroyablement entortillées. La gentillesse des autres clients m’a aussi mis du baume au cœur, après les embouteillages et les heures passées dans ce local surchauffé. Je suis rentrée au Buffalo Thunder fatiguée, mais heureuse. Le séva lessive était ainsi devenu une belle expérience interculturelle confortant l’enseignement d’Amma.

À mon retour à l’hôtel, le soleil nimbait d’or les montagnes qui encadraient l’hôtel et quelques nuages blancs s’effilochaient dans un chatoiement rosé. Le parking où se pressait une foule bigarrée affichait complet. Les programmes d’Amma attirent tous les âges, toutes les cultures et tous les milieux socio-économiques. Le staff qui voyage avec Amma pour assurer les programmes vient littéralement du monde entier. L’Amour pur d’Amma surmonte toutes les différences. Nos couleurs réunies deviennent l’arc-en–ciel qu’Amma évoque souvent. Il embellit et réjouit tout.
Rta S »