(11 mars 2021 – Célébrations de Shivaratri, Amritapuri)

Extraits du message d’Amma pour Shivaratri :

« Shivaratri est la nuit qui nous accorde des conditions suprêmement auspicieuses. Shivaratri est une célébration qui allie austérités spirituelles, renoncement, jeûne, dévotion et connaissance. Grâce à toutes ces pratiques d’adoration de Shiva, nous nous mettons dans des conditions suprêmement auspicieuses. Cela veut dire nous fondre en Dieu.

On appelle Shiva « le destructeur » ou le Dieu de la dissolution finale. Ce qui a un commencement doit avoir une fin. Et s’il y a un commencement et une fin, il doit sans nul doute y avoir préservation entre les deux. Il est absolument impossible que création, préservation et dissolution existent indépendamment. Pour que la fleur s’épanouisse, il faut que le bouton meure. Pour que le fruit se forme, la fleur doit tomber. Par conséquent création, préservation et dissolution sont seulement trois aspects de l’unique conscience suprême. De la même façon, Brahma, Vishnu et Shiva sont les trois différentes faces du seul Paramatma (l’Esprit suprême).

D’innombrables histoires et jeux divins racontent la grandeur de Shiva. Il est profondément absorbé en méditation.
Il est Naṭarāja, le danseur cosmique.
Il est le moine errant et solitaire qui demande l’aumône ; il est aussi le père de l’univers tout entier.
Il est Ardhanarisvara, la forme double masculine et féminine divisée en deux par le milieu.
Il est Bhairava, celui qui punit férocement les mauvais.
Il est Dakshinamurti, qui fut le premier maître spirituel des sages de l’antiquité et du monde.
Il est Nilakaṇṭha, celui qui a la gorge bleue, qui se fit le sauveur du monde. Il possède le troisième œil, l’œil de la connaissance suprême. Il a conquis Kala et Kama, le temps et le désir.
La liste des noms de Shiva est infinie, illimitée. Chacune des formes et chacun des aspects divins qu’il incarne sont lourds de sens, et nous enseignent de nombreuses vérités spirituelles.

On peut avoir beaucoup de chance dans la vie : par exemple on peut naître dans une famille noble, avoir des parents aimants, la beauté physique, une bonne santé, une excellente éducation, être riche, célèbre et avoir une bonne position sociale, etc. Mais tout cela est impermanent ; on l’a aujourd’hui, on ne l’aura plus demain. Tout cela dépend du monde matériel et de ses objets. Tout cela peut disparaître à tout moment. Ce qui est le plus auspicieux, c’est donc ce qui donne le bonheur permanent et le contentement qui ne seront jamais perdus. Il s’agit de la béatitude du Soi, de la fusion en Dieu. Shivaratri conduit à cette béatitude.

La observance traditionnelle de Shivaratri, c’est d’adorer Shiva en renonçant à la nourriture et au sommeil.
Shivaratri est la nuit au cours de laquelle, ayant dépassé les besoins de nourriture et de sommeil, nous veillons à ne pas glisser dans le sommeil de l’ignorance et à rester dans l’éveil de la véritable connaissance. Dans le monde, la nuit, les gens recherchent le repos ou le plaisir, mais l’attitude du dévot est différente. La nuit est parfaite pour se souvenir de Dieu. Les plaisirs des sens ne procurent qu’un bonheur éphémère et limité. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut jamais s’y adonner. Mais tout en jouissant de ces plaisirs, témoignons également de la gratitude pour la grâce de Dieu qui les a rendus possibles.

Le plaisir limité que procure le monde satisfait la plupart des gens. Mais il existe un bonheur et une paix supérieures qui adviennent lorsque nous maîtrisons les sens et le mental. Le jeûne et autres austérités spirituelles sont comme des clefs qui en ouvrent la porte.

Le jeûne est l’un des vœux de Shivaratri. Selon la tradition on observe un jeûne complet pendant toute une journée et toute une nuit. Mais il est également correct de jeûner en fonction des possibilités de chacun. En fait, le mot upasana (jeûne) veut dire « rester près » de Dieu ; ou encore demeurer établi dans le Soi.

En fait, tous les objets des sens peuvent être considérés comme une forme de nourriture. Renoncer à ce qui se mange équivaut à renoncer à tous les objets des sens. Rester une journée sans manger, c’est aussi mettre notre système digestif au repos. Pendant ce laps de temps, notre corps met à profit l’énergie économisée en travail de digestion pour se purifier des toxines et des maladies. Notre force vitale se remet à s’écouler dans la bonne direction, et le mental est plus prompt à glisser dans un état méditatif. Si nous passons la nuit sans dormir, nous resterons éveillés. De plus, notre attention est totalement focalisée pendant la méditation.

 

Il est possible de guérir de certaines maladies par le jeûne. Mais il ne faut pas tomber dans l’excès. L’équilibre et la modération sont essentiels. La Bhagavad Gita nous met en garde en disant que le yoga n’est ni pour ceux qui dorment trop, ni pour ceux qui dorment trop peu. La pression artérielle augmente quand on dort trop ou quand on dort trop peu. Le yoga est aussi inaccessible à ceux qui se privent trop de nourriture qu’aux gloutons. Beaucoup de gens ont du mal à empêcher leur mental de sombrer dans le sommeil quand ils essaient de focaliser leur attention. C’est inévitable si nous sommes trop léthargiques. Pour réussir à s’endormir, beaucoup de gens écoutent des discours spirituels ou des mantras enregistrés en guise de somnifères.

Shivaratri est le jour consacré au souvenir de Dieu. Le mental a du mal à rester concentré en toute vigilance et en permanence sur une seule chose. Cela ne peut se faire qu’avec un amour intense pour l’objet de notre concentration. C’est vrai aussi pour la méditation. Des pensées habituelles s’infiltrent dans le mental. Méditation et sommeil, ou méditation et pensées distrayantes, sont les meilleurs amis du monde. Comme le mental s’évade vers ce à quoi il est attaché ou vers ce contre quoi il est en colère, quand nous fermons les yeux pour méditer, il s’égare dans tous ces espaces. Quelle est la solution ? Cultiver la vigilance encore et toujours jusqu’à ce que nous puissions transcender cette tendance.

Pour Shivaratri, la plupart des gens jeûnent et veillent toute la nuit sans en comprendre la véritable portée. Veiller en regardant des films ou en jouant sur son téléphone portable, ce n’est pas observer Shivaratri. Comprenons le principe sur lequel reposent les vœux de Shivaratri.

 

Les huit manifestations de Shiva sont bien connues. Ce sont l’espace, le vent, le feu, l’eau, la terre, le mental, l’intellect et l’âme individuelle. Le principe qui sous-tend cette iconographie, c’est que Shiva imprègne l’univers tout entier. Il nous revient donc de voir Dieu dans tous les aspects de la création et de les aimer, de les servir, de les respecter et de les vénérer. Élevons-nous dans cette perspective en adorant Shiva. Shivaratri nous exhorte à nous éveiller du sommeil trompeur de l’ignorance et à trouver la paix et la beauté en nous. Puisse chacun d’entre nous s’élever à cet état d’éveil. Puisse la grâce vous bénir. »

 

Des enfants d’Amritapuri ont présenté quelques spectacles culturels en présence d’Amma. Des hymnes dévotionnels ont été chantés toute la nuit. Des rituels spéciaux liés à Shivaratri ont également été effectués au temple du Kalari.

Toutes les photos ici : https://www.amritapuri.org/81019/21sivaratri.aum